Episode description
C’est une première, la Fondation pour l’agriculture et la ruralité dans le monde (Farm) a récompensé le 28 janvier dernier les travaux d’un enseignant-chercheur burkinabè, Koulibi Fidèle Zongo. L’agronome a mesuré l’impact d’un compost fabriqué localement par une quarantaine de femmes cultivatrices de la région Nord du Burkina Faso, confrontées à des sols très pauvres, mais aussi à l’insécurité.
Avec ses travaux de recherche, Koulibi Fidèle Zongo a pour la première fois donné un caractère scientifique à l’expérience menée par 42 agricultrices de Niessèga, à une cinquantaine de kilomètres de Ouahigouya. Ces cultivatrices de sorgho et de niébé fabriquent elles-mêmes un compost pour amender les sols de la région qualifiés de « squelettiques ». « D’abord, nous avons caractérisé ces composts, pour voir quels sont les substrats qu’elles utilisent, notamment les graminées de brousse, la bouse de vache, la cendre, de manière locale, détaille Koulibi Fidèle Zongo. J’ai également conduit avec ces femmes des tests d’amélioration de ces composts, en utilisant des légumineuses, qui sont produites au niveau de la zone. Ces légumineuses ont été broyées et ajoutées à ces composts-là pour voir si cela apporte une amélioration à la fertilité de ces composts. »
Rendements doublés, mais quelle charge de travail ? Au bout d’un an seulement, les taux d’azote, de phosphore et de potassium ont été nettement améliorés. Et les rendements ont grimpé de 80 %. Reste à savoir si le gain économique est réel à l’arrivée. Car cela demande plus de travail et de déplacements aux cultivatrices, reconnaît Koulibi Fidèle Zongo, dans une région où l’insécurité est très présente. « La prochaine étape, c’est de voir de manière technico-économique si cette activité de production de compost est supportable par ces femmes. Car elles ont des contraintes. Elles doivent aller chercher les graminées de brousse un peu plus éloignées de leur habitation. Il faut vraiment évaluer cette charge de travail avant de dupliquer cette expérience dans d’autres régions du Burkina Faso », met-il en avant.
À lire aussiSénégal: former les jeunes à l'utilisation de la technique du compost dans l'agriculture
Les banques et la microfinance sont parties des zones sécuritairement compliquéesMais avec quels financements étendre ces expériences de recherche dans les régions du Burkina Faso les plus exposées à l’insécurité ? Gifty Narh, directrice de l’agence Corade, une structure de conseil pour le développement rural basée à Ouagadougou, observe que les communautés agricoles s’organisent : « Dans les zones d’insécurité, les banques sont parties, les systèmes de microfinance sont partis. Aujourd’hui, ce que l’on met en place, c’est ce qu’on appelle les associations villageoises d’épargne et de crédit (AVEC). Ce sont les acteurs eux-mêmes qui mettent de l’argent ensemble, qui se font du crédit entre eux, dans un mécanisme entièrement contrôlé par eux. »
Avec des taux d’intérêt de maximum 5 %, cette épargne de crédit endogène permet aux agriculteurs et agricultrices burkinabè d’être résilients sur le terrain dans les zones difficiles.
À écouter dans 8 milliards de voisins Quoi de neuf sur l’épargne villageoise?