Slate Podcast. Précédemment, dans le système. Je m'appelle Valentine, j'ai 33 ans et je suis magistrat. On pourrait se dire, quelqu'un qui sort de prison, qui recommet des faits pas graves, mais des faits quand même. Il n'a pas compris ce qu'on lui a dit encore. Je m'appelle Karim. J'ai fait huit mois dans une maison d'arrêt. Je n'ai plus envie de déconner. Le dealer de la drogue fini, voler fini, braquer fini. Ça ne me branche pas. Pourtant, on m'a proposé des coupes pour me rhabiller.
Quand tu sors de toi, il faudra bien. Il y en a plein qui m'ont dit, t'as plus de couilles, t'as laissé tes couilles au greffe. C'est une expression de voyou. Ça veut dire que t'es plus un voyou. Moi, je suis content de ne plus être un voyou. Maintenant, je veux être quelqu'un de normal. Je m'appelle Mathilde et je suis la soeur de Karim. Il n'y a pas eu de moment de respiration et d'apprécier
se dire ça y est je suis libre c'était ok maintenant c'est à moi de jouer et putain je sais pas par où je vais commencer J'en sors là, ça fait 6 mois que je suis sorti, et voilà. Le plus dur entre la sortie maintenant, ça a été de tenir le coup. Tenir le coup. au niveau des fréquentations, au niveau de l'addiction. La parole dit c'est dans la dope comme j'avais fait avant. Mon intégrité physique, elle en a pris un coup. Je suis marqué.
Et ça, ça me fout en l'air parce que je faisais un peu le cadeau, j'aimais bien faire le beau, tu vois. Voilà, ça se voit que j'étais dans la cam. Quand on voit ma gueule, on se dit ce mec, c'est incroyable. Ça, ça me fait chier. Je pense que si je suis très honnête, quand il y a une peine d'emprisonnement qui est prononcée à sortir d'un mandat de dépôt,
Il y a une certaine satisfaction. Il y a souvent une satisfaction des enquêteurs qui ont monté un dossier et ça compte pour eux les mandats de dépôt. Il y a une satisfaction de la victime qui se dit, au moins, la gravité des faits est reconnue et ce soir, je sais qu'il dort en prison. Et ce soir et les prochaines nuits. Maintenant, la prison, je crois que ça satisfait surtout l'opinion publique. Les gens sont...
sont contents quand il y a des peines de prison. Et puis, il n'y a pas grand-chose de bon qui arrive en prison. Mais par contre, peut-être que ça peut forcer les gens quand même à une réelle introspection parce que je pense qu'on extrait tellement les gens de toute leur vie ordinaire que peut-être...
peut-être il peut y avoir de la réflexion, une prise de conscience de la gravité, une prise de conscience aussi simplement parce que comme tout d'un coup on voit ces conditions de vie extrêmement dégradées, on se dit bah...
Oui, les faits que j'ai commis sont extrêmement graves. Ce dont je ne m'étais peut-être pas rendu compte avant, parce que si ce n'était pas si grave, je ne serais pas en train de partager ma chambre avec deux autres types et à faire pipi devant eux tous les jours. Ce n'est malheureusement pas une erreur de casting. si il s'est retrouvé en détention c'est qu'il a fait des choses qui sont répréhensibles par la loi
qui ont pu traumatiser des personnes, qu'il était jugé coupable, c'est pas une injustice. Le plus souvent quand on requiert un mandat de dépôt, c'est vraiment que l'emprisonnement apparaît comme... La moins mauvaise des solutions dans le sens où... En fait, souvent, l'emprisonnement, il intervient parce qu'il y a déjà eu des peines antérieures qui n'ont pas forcément été respectées ou des peines probatoires qui, pareil, voilà, allez.
Parce qu'on a pas mal de peine probatoire, il y a des gens qui sont sous le coup d'une mesure probatoire. recommettre des nouveaux faits, parfois exactement les mêmes. Et c'est vrai qu'au bout d'un moment, On s'interroge. En fait, monsieur ou madame ne comprend pas ce que la justice lui dit. On lui a dit une fois d'arrêter, deux fois d'arrêter, trois fois d'arrêter. Et en fait, on se voit contraint à un moment de faire enfermer les jambes parce qu'on se dit...
Est-ce que peut-être il va... il ou elle va entendre que son comportement n'est pas admissible, que ce soit... des délinquants d'habitude, des récidivistes des violences conjugales, des récidivistes de la route aussi, quand c'est la sixième fois qu'on juge quelqu'un en conduite sans permis, en conduite sous alcoolémie, etc. Et donc on se dit, je veux dire, on sait tous que la prison n'est pas une solution, mais on se dit, bah...
vu qu'on a fait un peu toutes les autres peines, que la personne n'a toujours pas compris, qu'elle continue à être un danger pour la société, qu'est-ce qu'on fait ? Emilie Martin, je travaille dans la réinsertion des personnes condamnées soit à l'extérieur, soit en milieu carcéral. Il y a des magistrats qui ont totalement conscience du travail qu'on fait, de la réalité de la mise en œuvre d'une peine, etc. Ça c'est clair.
Et il y a des magistrats qui prononcent des peines sans avoir aucunement conscience de la façon dont ça va être appliqué. C'est-à-dire, je te donne un exemple très concret, encore une fois, la peine de travail d'intérêt général. Aujourd'hui on peut prononcer jusqu'à 400 heures de travail d'intérêt général. T'as des magistrats qui vont le prononcer en se disant c'est très bien, c'est une super peine, etc. Dans un secteur dit rural.
où le mec habite à Petahouchnok, n'a pas de voiture, n'a pas de moyens proches, familiaux j'entends, de se déplacer. et qui finalement, ces heures, il ne pourra jamais les mettre en application. Pourquoi ? Parce qu'en plus, le partenaire n'existe pas. Pourquoi ? Parce que le référent en question, oui, il existait il y a 20 ans. Depuis, Dédé qui s'occupait d'aider les personnes antiges à faire pêtre les moutons, je dis n'importe quoi, mais il est mort, en fait.
Donc il n'y a plus de partenaires de tiges dans le secteur en question. Et ça, c'est valable dans la zone rurale, mais c'est valable ailleurs aussi. La prison, c'est le moins risqué comme peine à prononcer, parce que... Ça veut dire que la personne, de toute façon, tant qu'elle est, entre guillemets, à moins d'agresser d'autres détenus, d'agresser des souriants pénitentiaires, ce qui arrive, mais...
elle ne va plus rien faire. Alors que toutes les fois, où on accepte une peine probatoire, ou alors on fait exécuter les peines fermes autrement, c'est-à-dire avec un bracelet, avec un travail d'intérêt général, etc., on prend le risque que les gens commettent des faits. Sur les 6 premiers mois d'exercice où j'occupais mon poste, J'ai été heurtée par cette volonté de faire bouger les lignes.
que j'avais très profondément, par souci de justice, par souci d'équité, on l'appelle comme on veut. Et mon père m'a dit à juste titre, j'ai passé plus de 35 ans de carrière à essayer de faire évoluer un système. Et je me suis cassé les dents. Sache une chose, c'est que le système, tu ne le changeras pas. Essaye de te trouver ta marge de manœuvre et ton équilibre dans l'exercice de ce boulot-là. À partir du moment où tu y trouves ton compte, tu restes.
Et quand tu n'y trouves plus ton compte, tu t'en vas parce que tu ne changeras pas de système. On met massivement les gens en prison. Et je pense que ça répond bien à cet appel de la société. Moi, je pense qu'il y a une volonté d'emprisonner les gens, une volonté populaire d'emprisonner les gens.
Et nous, magistrats, j'ai l'impression que malgré nous, on répond quand même un peu à ça parce qu'on a beau construire des établissements pénitentiaires, le taux de surpopulation ne descend jamais. Il est extrêmement stable, le taux de surpopulation. Donc on voit bien que ce n'est pas la question du nombre de places. C'est plus une philosophie inhérente à la façon dont on juge les gens. Par exemple, quand il y a eu l'attentat qui concernait le père Hamel,
Moi j'ai beaucoup entendu, enfin c'est quand même quelqu'un, il avait un bracelet quoi. Genre l'air de dire, il aurait été en prison, celui-là, ce ne serait pas arrivé. Et je dis ce cas parce qu'il me revient en mémoire, mais c'est vrai que toutes les fois aussi, on fait le pari des gens qui ne vont pas recommettre d'infraction.
Eh bien, en fait, toutes les fois où on fait le choix d'une peine probatoire ou d'un aménagement à l'emprisonnement, moi je trouve qu'on prend un risque parce que quelque part, si quelque chose se passe, Si l'homme ou la femme qu'on laisse sortir s'avère finalement être un dangereux terroriste ou quelqu'un qui va sortir et aller tuer sa femme ou son époux en sortant de votre tribunal, etc., et bien clairement... on sera tenu pour responsable et moi j'estime que
Les gens sont quand même responsables d'eux-mêmes et qu'on ne peut pas anticiper. Ce n'est pas Minority Report et je trouve que c'est un ouvrage et un film extrêmement intéressant là-dessus, c'est qu'on ne peut pas anticiper le risque.
Et la prison, c'est l'absence de risque. Ce qui fait que quelqu'un va repasser à l'axe, c'est plurifactoriel. Et qu'on essaie d'anticiper au maximum les risques. Par exemple... les conjoints qui nous ont l'air très dangereux, où on a des expertises qui nous disent lui ou elle est dangereux, qui tiennent des propos absolument pas rassurants à l'audience, c'est vrai qu'on va avoir tendance à...
à demander de l'emprisonnement ferme, en se disant, au moins, peut-être des soins seront mis en place. Qu'ils mettent plus de personnel encadrant, plus d'assistants sociaux, plus de psys, plus de gens qui tentent d'être insérés. Tu vois que quand t'as une rage dedans, t'attends pas qu'un jour, quand t'es, voilà, qu'il y a des médecins, qu'il y a du personnel, quoi. Plus de place. Ouais, plus de place, plus de place. C'est ça la punition de la prison. Voilà, c'est une pause mais inutile.
Voilà, c'est la perte de temps. Je dirais que c'est ça, la punition, c'est la perte de temps. C'est ce que j'ai ressenti, la punition, c'est la perte de temps. ça prend rien du tout à part sur la vie s'humain. Mais ça t'a Quelque part, moi, j'ai l'impression qu'il fait la différence. le magistrat et le citoyen c'est que quand on est magistrat, on ne peut pas se permettre
d'avoir une idée générale. On sait très bien que les idées générales, elles seront, tôt ou tard, battues en brèche par un dossier. Et parfois, j'en vis les gens que je connais qui disent « Ah, mais de toute façon, ça, c'est toujours comme ci. » C'est toujours comme ça. Je les envie parce que moi, je sais que ce n'est pas vrai.
Je sais que parfois on peut être réellement ému par l'histoire personnelle de quelqu'un qui a commis des actes affreux. Je sais aussi que chaque dossier est extrêmement différent les uns des autres. et que toutes ces singularités, en fait, elles s'additionnent dans ce qu'on reçoit. C'est pas simplement, oui, dans les violences conjugales, finalement, c'est comme ci ou comme ça, c'est chaque dossier dans sa singularité. Moi, j'ai l'impression que je l'emporte un petit peu avec moi.
Karim est quelqu'un de brillant qui peut lire un bouquin et te le raconter comme le meilleur des critiques littéraires. de France Q. Il peut mettre un documentaire la veille et te le raconter et t'as absolument envie de le voir parce que ça a l'air vraiment incroyable. Il est très curieux. C'est aussi quelqu'un d'extrêmement drôle avec qui je peux chialer de rire. Il peut être aussi la personne la plus susceptible et la plus agressive que j'ai jamais connue.
En fait, c'est pas dans son caractère de base, c'est induit par 20 ans d'addiction et de... de confrontation au monde de l'addiction, à la rue, au manque. Je pense que ces incarcérations aussi ont joué, ont pesé dans la balance. et ont modifié sa personnalité avec des traumatismes qui ont créé des réactions disproportionnées. en fonction des situations où il se trouve. Les gens se mettent systématiquement du côté de la victime en disant, mais moi, si c'était moi, j'aimerais ça.
Du coup j'essaie toujours de... De leur expliquer que le procès pénal, c'est pas que pour les victimes, c'est aussi pour les victimes, mais c'est pas que pour elles. Et peut-être que ça peut être difficile à concevoir, mais c'est aussi pour le prévenu. Et ça, c'est ce que je trouve beau aux assises, c'est que comme on s'intéresse à la personnalité de l'accusé, aux assises, comme on prend le temps...
Je trouve que ça restitue les gens dans leur humanité. Et on ne juge pas seulement un acte monstrueux. On juge une personne qui l'a commis et pourquoi elle l'a commis. Pour les jurés en matière criminelle, ce qu'il faudrait qu'ils sachent, c'est qu'ils replacent la personne. qu'ils ont en face d'eux dans leur condition d'être humain. Alors attention ! Même moi, j'ai du mal à le faire.
Quand on est sur des actes absolument odieux, abjects. Mais ça pour moi, on est plus dans la maladie mentale. On est dans de la psychiatrie, on est dans de la psychopathie. Des choses qui sont quand même à la marge. On est sur moins de 2%. des infractions criminelles.
Indépendamment de ça, j'aimerais qu'ils puissent être en mesure de les replacer dans leur position d'être humain. Se dire que peut-être qu'un jour, un frère, une mère, un père, un ami, une amie... puissent louper cette fameuse marche et même en arriver à faire des trucs très graves parce qu'il y a des trucs extrêmement graves.
qui sont faites par des gens qu'on n'aurait pas soupçonnés, capables d'eux. Les gens ne sont pas toujours au clair avec l'irrationalité humaine. Je ne pars jamais du principe que les justiciables, qu'ils soient parties civiles ou auteurs, sont éloignés de moi. Je me dis, ça pourrait être moi, ça pourrait être quelqu'un que je connais. Et j'essaie de maintenir cette même distance. J'essaie de pas être...
de pas me positionner que du côté de la victime, de pas non plus me positionner que du côté de l'auteur, de trouver cette juste distance. J'ai pas de mal à penser que sur une goutte d'eau, on peut avoir un geste grave et malheureux, qu'il y a des conséquences graves et malheureuses sur quelqu'un. Tout en étant parfaitement intégrés, éduqués, etc. Et après, les gens sont toujours... C'est tarte à la crème, mais c'était quelqu'un de tellement gentil, poli, discret, il ou elle, bien sûr.
Alors qu'on porte tous de la colère en nous, on porte tous de la violence en nous. Selon la façon dont on a été élevé, dont on a grandi, selon notre parcours, selon notre vie, on est plus ou moins en capacité de la sublimer, d'en faire quelque chose de positif ou d'en être le jouet. Ce qui est terrible ! c'est qu'au fond je sais que c'est ce qu'on appelle un gentil garçon. C'est peut-être pas le terme approprié mais...
Ouais, c'est un mec bien à la base. Sauf qu'il est capable des pires horreurs. Et là, je veux dire... On est parti sur un mec bien qui a eu 20 ans d'addiction et d'expérience hyper violente. qui l'ont transformé pour toujours, je pense, en plus. Il a parfois certainement dû être obligé d'avoir ses attitudes pour survivre dans un environnement. n'est pas celui dans lequel j'évolue et dans lequel je n'ai jamais évolué ces réactions peuvent être hyper violentes et hyper
C'est difficile parce que tu sais que la réinsertion, c'est difficile. Tu sais pas forcément où aller. Tu sais pas forcément comment ça se passe. Si on veut encore t'envoyer chier, des fois tu serais prison, t'as la rage, des fois t'as la haine, t'es un rageux, t'as envie de parler à personne, t'as marre de raconter ta vie. Je m'appelle Sophie, je suis surveillante pénitentiaire. Enfin, c'est pas une vie d'être incarcérée quoi.
Bien sûr, quand on commet des crimes, je ne dis pas pour des délits. Quand on passe des mois et des mois en prison, je veux dire, il y a autre chose à l'extérieur. que d'être enfermé entre quatre murs quand même. Pour moi, c'est pas une injustice qu'il était en prison. Qu'il était jugé coupable, c'est pas une injustice. L'injustice, c'est ce qu'est la prison aujourd'hui en France.
Je pense que personne ne peut, de ce que j'en sais, de ce que j'en vois, de ce que j'en ai appris, je pense que personne ne peut en sortir meilleur. Je pense que personne ne sort un interne et deux meilleurs de l'incarcération. En tout cas, en maison d'arrêt. Certains sont venus en tant que mineurs et qui reviennent en tant qu'adultes. Oui, effectivement. C'est malheureusement un schéma qu'on constate souvent.
C'est bien dommage, ouais. Je dirais qu'une femme reviendra quand même moins en prison. Peut-être parce qu'elle a une vie de famille, peut-être parce qu'elle a des enfants et que ça la retient de faire des, entre parenthèses, des conneries ou des crimes, enfin des délais, plutôt des crimes, c'est autre chose, des délais. Un homme... Oui, ça revient beaucoup. Plus les hommes, effectivement. Plus les hommes pour des délits vols.
Stup. Deux clics. Regarde, j'ai gâché ma vie. J'ai 40 pis, j'ai rien. J'ai tout gâché. J'ai mon fils qui commence à capter. J'ai envie d'être inséré. insérer normalement un boulot, une famille. Voilà, j'ai plus envie de... J'ai plus le sirop de la rue. C'est pour ça que la justice est humaine, c'est parce qu'il faut miser sur l'humain et miser sur le fait que oui, les gens peuvent changer. Sinon, si on pense que les gens ne peuvent pas changer... Il ne faut pas faire le métier de magie.
Moi, j'aimerais bien travailler sur ça, sur la prévention. Je ne sais pas, éducateur, je ne peux pas avec mon casier ou dans une assoce. travailler sur ça, sur mon expérience et essayer de la transmettre aux autres et de pas tomber dans ce piège parce que c'est ça, tu tombes dans le piège à 20 ans, tu crois que t'es fort et puis à 30 ans tu te rends compte que t'es pris dedans et que c'est plus toi qui es là. Donc j'aimerais bien...
Essayer de travailler sur ça, idéalement. Après, si je ne trouve pas, je trouve autre chose. Mais idéalement, ça serait de me servir de ça. de ces sales expériences horribles pour essayer de le faire éviter à d'autres personnes. La détention en maison d'arrêt lui a fait absolument aucun bien, aucun bénéfice. Je pense que ça l'a... traumatisée à bien des égards. Un choc post-traumatique parce que la prison est devenue ultra-violente, enfin celle où j'étais.
Je ne supporte plus la violence, ni dans les films, ni dans la rue. J'ai même des stress quand je dois sortir dans la rue. J'ai pas une agoraphobie, mais... Quand je revois des zonards, des lascars que je connais, des dealers, des toxicos, ça me stresse d'une façon vraiment grande. J'ai vu un gars, le ventre ouvert, qui se tenait les tripes. Et moi-même, je me suis fait défoncer une fois en début de peine, très, très violemment, où j'ai cru vraiment que j'allais y passer.
Et voilà, ça je repense, oui. Sans compter d'autres faits de violence que j'ai vus en promenade complètement déjantés, des coups de couteau, des verres cassés, des mecs dévisagés. J'y repense, oui, bien sûr. J'y repense pas en forme de souvenir concret, mais ça... Ça participe un peu à l'angoisse que j'ai tout le temps, au stress que j'ai tout le temps. Passer un stress, ça génère du stress. J'ai du mal à m'endormir, je suis un peu parano, hyper méfiant.
J'essaie d'éviter les embrouilles. J'ai l'impression qu'on va ouvrir ma porte, je coince ma porte, je ferme mes volets, je mets la télé tout doucement, j'ai l'impression qu'on m'écoute. Qu'il y a des flics qui vont me lever à 6h du matin. Voilà, ça se manifeste comme ça. Je m'endormais à coup de cash-tout. Là, je suis à la moitié de ma vie. J'en ai passé l'autre moitié à me détruire. Maintenant, j'aimerais bien me reconstruire. Me reconstruire bien et vivre bien.
Même si je ne gagne pas trop d'oseilles, mais faire un truc qui me plaît déjà, un taf qui me plaît, même si je dois gagner le smic, je m'en fous. Je m'en fous. Le bling bling et tout ça, l'oseille, les bagnaux, je n'en ai plus rien à foutre. J'ai envie de faire un truc qui me plaît, positif, et pour les autres. Parce que c'est vraiment dur. C'est vraiment dur et c'est pas très changé.
Vous venez d'écouter Le Système, un podcast d'Elise Costa et Mathilde Largeteau, produit et réalisé par Slate.fr sous la direction de Christophe Caron et Benjamin Septembrus. La musique est signée Arnaud Denzler.