Exfiltration des Bongo: «Pas de lien de causalité avec notre réintégration à l'UA», selon le vice-président Barro Chambrier (Gabon)
Episode description
Depuis jeudi soir, Ali Bongo, sa femme Sylvia et leur fils Noureddin ne sont plus au Gabon. Ils ont été transférés en Angola. À Libreville, le procureur général s'est exprimé vendredi pour dire que la femme et le fils de l'ex-président gabonais étaient sortis de prison pour raisons de santé, mais qu'ils n'étaient qu'en liberté provisoire et qu'un procès aurait quand même lieu. Pas de communiqué des autorités politiques gabonaises. Mais ce samedi matin, sur RFI, le vice-président gabonais en charge du gouvernement, Alexandre Barro Chambrier accepte de nous en dire un peu plus. Il affirme que cette exfiltration de la famille Bongo n'est pas la contrepartie de la réintégration du Gabon dans l'Union africaine.
RFI : Vous prenez vos fonctions auprès du président Oligui Nguema avec de très grandes ambitions économiques. Mais au moment où le prix du baril de pétrole est en dessous de 65 dollars, est-ce que vous n'allez pas devoir réviser vos projets à la baisse ?
Alexandre Barro Chambrier (vice-président du gouvernement gabonais) : Il est évident que nous sommes dans un contexte international qui est plein d'incertitudes et, dans cette situation, nous prenons les dispositions pour renforcer les finances publiques. Et les dispositions sont en cours, d'ores et déjà, pour pouvoir réduire le train de vie de l'État. Il n'est pas exclu, effectivement, que nous ayons une loi de finances rectificative.
Le problème le plus urgent pour beaucoup de Gabonais, c'est le manque d'électricité. Quand est-ce que vont cesser les pannes de courant ?
Il y a déjà une amélioration par rapport à ces délestages, mais nous nous donnons deux ans pour que les problèmes de délestage, les problèmes d'accession à l'eau soient résolus. Et nous avons une ambition, le président Oligui Nguema veut une croissance forte à près de deux chiffres qui permettra effectivement de créer les emplois et de réduire la pauvreté.
Dans ce nouveau régime, il n'y a plus de Premier ministre. Le président est entouré de deux vice-présidents, Séraphin Moundounga et vous-même, comment les rôles vont-ils se répartir entre vous deux ?
Écoutez, il n'y a aucun problème. La Constitution est très claire. Le président oriente, le président décide. Il supervise. Le vice-président du gouvernement, que je suis, coordonne l'action du gouvernement et prépare les arbitrages.
Est-ce que vous ne risquez pas d'être un simple exécutant des ordres donnés par le président Oligui Nguema ?
Écoutez, si je suis un bon exécutant, ce sera déjà quelque chose de satisfaisant. C'est lui qui est élu, c'est lui qui dispose de la légitimité. Donc, il n'y a pas dyarchie. Les choses sont très claires.
Il y a un ministère très important qui est créé à l'occasion de cette installation de cette nouvelle République, c'est le ministère de l'Économie et des Finances. Et le titulaire de ce nouveau ministère est Henri-Claude Oyima qui est le PDG et l'un des principaux actionnaires de la Bgfibank, la plus grande banque privée de la zone CEMAC d'Afrique centrale. Est-ce qu'un ministre qui continue d'être rémunéré par une entreprise privée, ce n'est pas illégal ?
Je pense que c'est un homme de talent, d'expérience, qui prendra toute sa place dans ce gouvernement et je m'en réjouis. Et la situation de monsieur Oyima est en voie de clarification puisque lui-même a annoncé qu'il allait se retirer de ses activités privées. Et Henry-Claude Oyima prendra le recul et la hauteur nécessaires dans le cadre de ses nouvelles fonctions. Nous pouvons lui faire pleinement confiance.
On l'a appris ce vendredi matin, l'ancien président Ali Bongo, sa femme Sylvia et leur fils Noureddin ont quitté le Gabon et sont arrivés en Angola. Comment s'est passée cette exfiltration ?
Cette affaire suit son cours judiciaire. Nous avons vu que le procureur général a mentionné des motifs en rapport avec l'état de santé de ceux qui étaient détenus à la prison centrale pour cette liberté provisoire. Bon, il faut respecter la séparation des pouvoirs.
Le député de transition Geoffroy Foumboula s'exclame : « C'est une véritable honte ! C'est le prix à payer pour la réintégration du Gabon au sein de l'Union africaine »...
Écoutez, je lui laisserai la responsabilité de ses propos. Le Gabon a retrouvé sa place dans l'Union africaine à la suite d'élections qui ont été considérées comme exemplaires et transparentes, dont le même député lui-même a salué l'objectivité.
Et cette sortie des Bongo du Gabon facilite les choses avec l'Union africaine ?
Je ne le crois pas. Il n'y a pas pour moi de lien de causalité avec notre réintégration, qui est antérieure aux faits dont nous parlons aujourd'hui.
Pendant leurs 20 mois de prison, Sylvia et Noureddin Bongo disent qu'ils ont subi de mauvais traitements. Est-ce qu'ils ont été fortement encouragés à révéler les numéros de leurs comptes bancaires à l’étranger ? Et maintenant que vous avez récupéré ces numéros et tout l'argent qu'ils possédaient, est-ce que vous pouvez les laisser partir ?
Non, mais là, franchement, je pense que vous avez une imagination fertile et que moi, dans ma qualité de vice-président du gouvernement entrant, vous comprenez bien que je ne puisse pas vous répondre sur de telles assertions qui ne sont pas du tout prouvées.
À lire aussiL'exil de la famille Bongo en Angola suscite des réactions contrastées au Gabon